En juin 2017, le Comité permanent des finances de la Chambre des Communes a lancé le processus des consultations prébudgétaires, invitant les particuliers et les organisations à faire part de leurs priorités au sujet des fonds du budget fédéral de 2018 – et Retraités fédéraux représente les intérêts de ses membres.
Le gouvernement a repris les thèmes de la croissance économique, de la productivité et de la compétitivité de l’an dernier et a axé les consultations budgétaires de 2018 sur des mesures fédérales allant de l’éducation et de la formation à la santé et au logement, qui aideraient les Canadiens et les entreprises canadiennes à accroître leur productivité et à maximiser leur contribution à l’économie.
Lorsque nous entendons (ou lisons) le mot « productivité », la plupart d’entre nous pensent automatiquement à un contexte de fabrication et, par exemple, à la production de gadgets logiciels. Et, même si la productivité en tant que mesure a tout à voir avec la pondération des extrants économiques, comme le produit intérieur brut ou PIB (et, parfois des gadgets logiciels, des voitures ou des machines à laver), dans le cas des intrants comme les heures de travail, cela représente bien plus — et nos contributions à la productivité et à une économie forte ne s’arrêtent pas quand nous quittons le marché du travail ou que nous vieillissons.
Le vieillissement en santé
Nous savons que les aînés demeurent des contributeurs actifs et indépendants aux économies, capables de dépenser sur des biens et des services et de contribuer à de meilleures balances commerciales. Cette capacité dépend en grande partie de la prise en compte des déterminants sociaux de la santé, à savoir l’accès à un logement abordable et approprié et aux collectivités, la sécurité du revenu de retraite et les filets de sécurité sociale comme les soins de santé (y compris les soins à domicile et les soins de longue durée).
Mais les lacunes des politiques sociales du Canada sont en train de constituer des obstacles à l’indépendance des aînés et au rôle essentiel qu’ils jouent au sein de collectivités et d’économies saines et dynamiques.
Retraités fédéraux préconise depuis longtemps une stratégie nationale sur les aînés portant sur les soins à domicile, le logement et la vie communautaire et nous demandons qu’elle soit l’objet d’un regain d’attention dans le budget de 2018. Une telle stratégie fournirait le plan directeur d’un continuum de soins intégrés répondant aux besoins d’une population d’aînés grandissante, tout en soutenant une économie dynamique intergénérationnelle — d’autant plus que les lacunes dans les solutions de soins axés sur les aînés accroissent les pressions et les exigences exercées sur les aidants naturels, ce qui a des répercussions sur la productivité nationale et nuit à l’économie. Continuer à compter sur des aidants naturels non payés pour assumer les soins aux aînés — alors même que notre population vieillit — ne constitue pas la solution visionnaire souhaitée par les aînés, les familles ou les entreprises du Canada.
Une retraite assurée
Et nous ne pouvons jamais sous-estimer l’importance d’un revenu de retraite adéquat et sûr. Et les régimes de retraite à prestations déterminées disciplinés et bien gérés représentent la meilleure façon d’y parvenir. Les recherches ont montré que les régimes de retraite à prestations déterminées affermissent le système de revenu de retraite canadien et contribuent à la prospérité nationale.
Mais pour les personnes qui n’ont pas de régimes de retraite à prestations déterminées, il est plus difficile que jamais de bénéficier d’une sécurité lors de la retraite. Et cela touche bien des Canadiens. La couverture des pensions est à la baisse, les épargnes personnelles des Canadiens sont faibles, les outils comme les REER présentent de graves inconvénients et des lacunes demeurent au sujet de l’expansion du RPC et les données du recensement ont révélé des taux de pauvreté grandissants chez les aînés. Il est essentiel de combler ces lacunes dans tout plan de croissance économique continue du Canada.
Une législation du gouvernement déposée en octobre 2016, du nom de Projet de loi C-27 — Loi modifiant la Loi de 1985 sur les normes de prestations de pension, représente une menace réelle pour la sécurité de la retraite.
Cette législation introduirait un cadre instaurant des régimes de retraite à prestations cibles dans le paysage des pensions fédérales du Canada. Établis de manière juste et équitable à titre de nouveaux régimes, et seulement à compter de maintenant, ils peuvent augmenter la sécurité de la retraite pour certains Canadiens. Malheureusement, le projet de loi C-27 permettra aux régimes de retraite à prestations cibles de remplacer les régimes de retraite à prestations déterminées valables et des pensions de retraite déjà gagnées de nombreux Canadiens à la retraite ou encore actifs. À long terme, cela aura des répercussions négatives sur les économies locales et nationale. À cette fin, Retraités fédéraux continue de demander au premier ministre Trudeau d’honorer les promesses faites durant la période précédant l’élection de 2015 et de mettre immédiatement le projet de loi C-27 de côté.
À l’ordre du jour législatif
La plupart des experts s’entendent pour dire que le gouvernement fédéral a un programme législatif chargé pour la session d’automne : la marijuana, la sécurité nationale, la modernisation des transports et les lois sur l’accès à l’information sont à l’ordre du jour, et la réforme fiscale et électorale devrait suivre.
La question de la réforme fiscale est susceptible de prendre de l’ampleur cet automne et au début de l’hiver, alors que nous approchons du dévoilement du budget fédéral de 2018. Les consultations tenues par Finances Canada au cours de l’été ont été caractérisées par des reculs de la part du secteur privé et des accusations de malhonnêteté par rapport à l’interprétation du gouvernement qualifiant la réforme de question d’« équité ».
La question est litigieuse, et constitue probablement une bataille difficile à gagner. Nous pouvons nous attendre à beaucoup de verbiage de la part de tous les partis et à des tactiques pour détourner l’attention des questions plus difficiles qui préoccupent la plupart des retraités, comme la Stratégie nationale pour les aînés et le projet de loi C-27.
Citons en exemple un récent éditorial paru dans le Globe & Mail (le 19 septembre 2017) et signé par Fred Vettese, actuaire en chef de Morneau Shepell, une firme d’actuariat et d’avantages sociaux. Si les règles fiscales proposées par le gouvernement libéral visent l’équité, soutient M. Vettese, alors les pensions du secteur public fédéral devraient être converties de prestations déterminées en prestations cibles. À son avis, c’est la façon la plus juste de s’attaquer au déficit et de promouvoir l’équité.
Au mieux, les commentaires de M. Vettese sont une diversion et une distraction. Les Canadiens ont de la difficulté à épargner en vue de la retraite, et l’« équité » ne consiste pas à niveler par le bas. Les politiques publiques doivent se concentrer sur l’augmentation de la sécurité de la retraite. En se concentrant à nouveau sur les pensions du secteur public — qui sont gagnées par les cotisants pendant plusieurs décennies de versements effectués toutes les deux semaines —, car le bouc émissaire ne va pas accroître la sécurité de la retraite pour les autres Canadiens.
Au pire, les affirmations de M. Vettese sont trompeuses. Premièrement, la comptabilité des pensions du secteur public fédéral représente bien plus que ce qu’il a expliqué. Par principe, les pensions sont une question de salaire différé, c’est-à-dire qu’une entente est une entente et que les employeurs ne devraient pas pouvoir récupérer la rémunération promise à leurs employés en poste ou retraités.
Maintenant, imaginons un instant que le projet de loi C-27 est adopté ou que les pensions du secteur public fédéral sont converties en régimes à prestations cibles. Ces régimes exigent des évaluations actuarielles plus fréquentes et plus complexes. Qui fait ces évaluations? Eh bien, des gens comme Fred Vettese et des sociétés comme Morneau Shepell. Alors, qui donc a vraiment intérêt à tirer profit des régimes à prestations cibles?
Budget 2018 Possibilité ou même rengaine?
Le temps — et nos efforts — nous dira si le gouvernement met l’accent sur la sécurité de la retraite et une stratégie nationale pour les aînés.
« Les aînés continuent d’aider nos économies locales et nationales à se développer », affirme Jean-Guy Soulière, président de l’Association nationale des retraités fédéraux. « Et, comme la proportion d’aînés est plus élevée que jamais auparavant par rapport aux jeunes, il est impératif que les gouvernements investissent dans des initiatives avant-gardistes et bienveillantes à l’égard des aînés qui permettront à des générations d’aînés canadiens — y compris leurs familles et ceux qui ne sont pas encore des aînés — de continuer d’être une force dans nos collectivités et nos économies. »
Retraités fédéraux a également recommandé l’ajout d’une voix expressément dédiée aux aînés au sein du Cabinet, tout comme c’est le cas avec un ministre de la Jeunesse. Les Canadiens comprennent le besoin d’un ministre responsable de la Jeunesse : les jeunes, après tout, sont l’avenir du Canada Mais les aînés, qui représentent la plus forte croissance démographique au Canada ayant plus que jamais l’occasion de contribuer, devraient avoir une voix dédiée à la défense de leurs besoins uniques au sein du gouvernement, en veillant à ce que nous examinions toujours les décisions sur les politiques publiques du point de vue des aînés.
« Nous en sommes à la mi-mandat de “la voie ensoleillée”, et l’élection de 2019 est en vue », observe M. Soulière. « Nous nous attendons à ce que le budget fédéral de 2018 mette davantage l’accent sur les priorités des aînés en matière de soins de santé et de sécurité de la retraite. »