Le DG de Retraités fédéraux, Anthony Pizzino, demande au gouvernement fédéral d’accorder la priorité au bien-être des vétéran·e·s canadiens et de leurs familles.
La Semaine des vétérans est un moment de commémoration et de réflexion. Et comme la législature doit reprendre ses travaux dans quelques semaines, il est temps de réfléchir à ce qu’il faut faire pour répondre aux besoins des vétéran·e·s.
Malheureusement, peu importe le parti politique au pouvoir, les vétéran·e·s ont une longue liste de plaintes valables concernant la façon dont le gouvernement fédéral les traite après avoir servi le Canada.
Notre message à la 44e législature du Canada est clair : il est temps de mettre en place un système qui répond aux divers besoins des vétéran·e·s. Rétablir la confiance des vétéran·e·s, régler les problèmes de longue date et tracer la voie à suivre est une question de respect et de dignité.
En 2017, l’Association nationale des retraités fédéraux a organisé une série de forums publics et de sondages en ligne à l’échelle du pays, pour connaître les préoccupations des vétéran·e·s. Tant les vétéran·e·s des Forces armées canadiennes que de la GRC ont mentionné les difficultés que posent le paiement des pensions et l’accès aux prestations en temps voulu, les délais et les incohérences dans le transfert des soins et des dossiers médicaux, les lacunes dans le soutien à la transition et l’insuffisance des renseignements sur la libération. Et, comme si cela ne suffisait pas, les processus de demande et de présentation d’appels sont complexes, et des problèmes d’évaluation et de réévaluation ont été signalés. La difficulté d’obtenir des informations et les besoins de communication non satisfaits contribuent à un stress élevé et à une méfiance à l’égard des organisations mêmes sur lesquelles les vétéran·e·s doivent compter pour leur stabilité et leur bien-être après leurs années de service à leur pays.
Les résultats de 2019-2021 concernant les normes de service d’Anciens Combattants Canada (ACC) pour les décisions relatives aux prestations d’invalidité étaient lamentables. Le ministère s’était engagé à rendre 80 % des décisions relatives aux prestations d’invalidité, et à la douleur et la souffrance additionnelles — pour tenir compte des besoins des vétéran·e·s les plus malades et blessés —, dans un délai de 16 semaines.
Cet objectif n’a été atteint que dans 24 % des cas, ce qui signifie que les vétéran·e·s malades ou blessés sont incapables d’accéder aux avantages et aux services financiers, de santé et d’un autre ordre offerts par ACC. Il faut reconnaître que le ministère a été fortement sollicité en raison de l’augmentation du nombre de demandes, mais était-ce totalement inattendu après les longs engagements militaires du Canada à l’étranger au cours des vingt dernières années?
Et ces niveaux de service sont pires si vous êtes francophone ou une femme vétérane. Les femmes constituent le segment de la clientèle d’ACC qui croît le plus rapidement et elles subissent des délais de traitement plus longs que leurs homologues masculins. Les délais de traitement des demandes sont également plus longs pour les francophones. De nombreux aspects du système militaire et du système des vétéran·e·s ne tiennent pas compte des différences entre les sexes, ce qui entraîne des préjugés systémiques, des lacunes dans la recherche et des taux plus élevés de blessures et de maladies entraînant une libération médicale pour les femmes.
Le gouvernement libéral précédent avait reconnu la nécessité d’investir davantage et d’obtenir des ressources supplémentaires pour régler des problèmes comme l’arriéré des demandes et les retards résultant des compressions mises en œuvre par le gouvernement conservateur précédent, et 192 millions de dollars seront versés au ministère en 2020-2021 et 2021-2022. Mais, comme l’a signalé le Bureau parlementaire du budget, un changement systémique est essentiel et, en investissant après 2021-2022, on pourrait éliminer l’arriéré en 2023. Les défenseur·e·s des vétéran·e·s ont clairement indiqué le besoin essentiel de solutions accélérées et créatives à ces problèmes, et veulent savoir ce qui va suivre.
Dans sa plateforme électorale, le Parti libéral s’est engagé à s’attaquer au problème des sans-abri chez les vétéran·e·s, à régler l’arriéré des prestations, à mettre en œuvre une stratégie d’emploi pour les vétéran·e·s et à soutenir la commémoration, tout en assurant que la diversité et l’inclusion s’inscrivent dans les approches retenues. Il existe également une base solide sur laquelle s’appuyer. Par exemple, ACC a maintenant un Bureau de la condition féminine et des vétérans LGBTQ2, et le Groupe de transition des Forces armées canadiennes travaille à améliorer la transition et la libération du service.
Le rétablissement de la confiance doit faire partie de la voie à suivre. Qu’ils et elles aient été contraints de poursuivre leur propre gouvernement en justice pour obtenir des prestations bien méritées, ou soient encore en train de guérir d’un traumatisme sexuel lié au service militaire, bon nombre de vétéran·e·s d’aujourd’hui ont perdu leur confiance dans la chaîne de commandement et dans le gouvernement. Une litanie de changements administratifs et d’erreurs de calcul des paiements a aggravé ce manque de confiance dans le système.
Il existe des moyens de résoudre ces problèmes de confiance perçus.
Ottawa doit améliorer l’accès à l’information et aux ressources pour s’assurer de rejoindre un plus grand nombre de vétéran·e·s et de proches aidants, même si ceux-ci et celles-ci n’ont pas de lien avec ACC. Le système doit travailler à des solutions tenant compte des différences entre les sexes avec les prestataires de services nationaux, les prestataires de soins de santé civils, les organismes sans but lucratif et les organismes communautaires.
Il faut également mettre l’accent sur la communication et les programmes qui touchent tous les ministères, comme les initiatives de transition en cours dans les Forces armées canadiennes sous l’égide du ministère de la Défense nationale, en établissant des liens avec ACC et les organisations qui servent les vétérans et leurs familles.
La suite des événements ne dépend pas uniquement du gouvernement fédéral. Il incombe également aux vétéran·e·s et à leurs défenseur·e·s de tenir le gouvernement responsable de la réalisation de progrès réels, à compter du 22 novembre.
Anthony Pizzino est le DG de l’Association nationale des retraités fédéraux.
Cet article a été initialement publié dans l’édition du 8 novembre 2021 du Hill Times (en anglais), un journal établi à Ottawa qui publie principalement des reportages spécialisés et impartiaux sur les politiques et la politique.