Le pouvoir des pensions

11 avril 2025
Le pouvoir des pensions.
Une étude sur l’impact économique des pensions a révélé que celles-ci alimentaient considérablement les coffres de l’État, soutenaient les économies rurales et aidaient les travailleurs marginalisés.
 

 
Pour chaque dollar d’augmentation du revenu de pension versé tous les mois au pays, les gouvernements récupèrent 41 cents. Ce n’était là qu’une des nombreuses conclusions tirées d’un rapport du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) que Retraités fédéraux a soutenu. 

Intitulé Le pouvoir des pensions : L’impact du revenu de pension sur l’économie canadienne, le rapport souligne le rôle crucial du revenu de pension à l’appui des collectivités canadiennes et de l’économie dans son ensemble. Il fournit aussi des renseignements précieux à ceux qui ont toujours défendu la dignité à la retraite. 

En examinant tous les régimes de retraite en milieu de travail en 2021, dont ceux des employés des secteurs public et privé, le rapport a révélé que la contribution du revenu de retraite s’élève à 84 milliards de dollars, soit 5 % de tous les revenus reçus par les Canadiens cette année-là. C’est plus que le revenu du Régime de pensions du Canada (RPC), du Régime de rentes du Québec et de l’assurance-emploi. 

« En matière de revenu dans l’économie, les pensions en milieu de travail sont plus importantes que les retraits des REER, plus importantes que le RPC, plus importantes que le travail autonome, car elles dépassent chacune de ces catégories amalgamées », affirme David Macdonald, le principal auteur du rapport. « Donc, malgré le fait que les REER mènent le bal — nous savons certainement quand la date limite des REER approche —, ils ne sont pas aussi importants que les pensions d’emploi lorsqu’il s’agit de soutenir les personnes ayant un revenu à la retraite. » 

Autre constat : En 2025, le revenu des régimes de retraite en milieu de travail, et les dépenses des personnes âgées qui en découlent, contribueront au revenu fédéral à hauteur de 24,5 milliards de dollars. 

« Quant aux coffres des gouvernements provinciaux et fédéral, [les pensions de retraite en milieu de travail sont] un soutien extrêmement important », ajoute M. Macdonald. « Tout cet argent est imposable : sur le revenu ainsi que sur les taxes à la consommation lorsqu’on le dépense dans l’économie, mais aussi à titre d’épargne. Le soutien aux aînés est un élément important de ce que fait le gouvernement fédéral et, dans la mesure où il n’a pas à soutenir les aînés parce qu’ils ont une pension, c’est une épargne du point de vue fédéral. » 

Et cela ne tient pas compte des économies que le gouvernement federal réalise dans le système de soins de santé, car les Canadiens bien nantis ont de meilleurs résultats en matière de santé. 

M. Macdonald dit qu’il est ironique que les gouvernements, qui contribuent aux régimes de retraite de leurs employés tout comme ceux-ci, considèrent ces cotisations comme des « dépenses directes pour lesquelles ils n’obtiennent rien, comme s’ils avaient pris cet argent et l’avaient brûlé dans un trou dans le sol. Ensuite, ils déclarent ne pas pouvoir “se permettre ces dépenses”. Le problème, avec cette logique, c’est qu’ils investissent un dollar et que les travailleurs égalent leur dollar. Mais ensuite, cet argent est investi et fructifie pendant 40 ans, et les gouvernements l’imposent à nouveau, à 41 cents sur le dollar. » 

Selon M. Macdonald, lorsqu’on se penche sur le cycle de vie d’une pension, et non pas seulement les cotisations, les rendements sont colossaux, parce que la plupart des revenus que les caisses de retraite obtiennent ne découlent pas des cotisations, mais des rendements boursiers ou de la vente d’actifs à profit. 

Une autre conclusion clé de l’étude est que le revenu de pension soutient considérablement de nombreuses économies locales, en particulier les collectivités dont le revenu d’emploi est inférieur à la moyenne. Et, pour l’illustrer, l’étude comporte une carte interactive (bit.ly/3Cl5Zvw) des 85 municipalités pour lesquelles le CCPA a examiné la proportion du revenu des résidents qui est attribuable au revenu de pension. Par exemple, dans la circonscription fédérale de Fredericton-Sud, le revenu de pension était de 87 millions de dollars, soit beaucoup plus que les retraits du FERR, le revenu des entrepreneurs ou l’assurance-emploi et l’aide sociale en tant que catégories individuelles. 

Fait peu étonnant peut-être, l’étude a également déterminé combien le secteur public surpasse le secteur privé pour ce qui est d'offrir une sorte de régime de retraite, ce qui, à son tour, se traduit par une sécurité de retraite à des groupes plus marginalisés, comme les femmes, les groupes autochtones et les nouveaux Canadiens. 

Selon M. Macdonald, « Ils sont beaucoup plus susceptibles d’avoir des régimes de retraite dans le secteur public que dans le secteur privé. On présente souvent l’argument que le secteur public devrait ressembler davantage au secteur privé. Ce serait un changement massif dans la sécurité de la retraite pour tout le monde, et plus particulièrement pour certains de ces groupes clés [dont les membres ont] historiquement connu une période difficile sur le marché du travail pour commencer. De plus, cet argent ne retournerait pas dans l’économie. » 

L’érosion des régimes à prestations déterminées dans le secteur privé constitue une conclusion préoccupante. M. Macdonald a constaté un déclin du régime de retraite à prestations déterminées dans les taux de couverture bruts, ainsi que dans la qualité des régimes de retraite dans le secteur privé, même si vous en avez un. Dans les années 70, 90 % des régimes de retraite du secteur privé versaient des prestations déterminées. Aujourd’hui, c’est seulement 40 %. 

« Ce rapport renforce l’une de nos priorités fondamentales en matière de défense des intérêts, à savoir que tous les Canadiens méritent la dignité et la sécurité à la retraite », remarque Anthony Pizzino, DG de l’association, qui a soutenu l’étude. 

« Une meilleure sécurité de la retraite au moyen des pensions est non seulement bénéfique pour les personnes sur le marché du travail et à la retraite, mais elle joue également un rôle crucial de soutien à l’économie canadienne, aux finances publiques, aux communautés locales et, dans le cas des groupes historiquement défavorisés, à l’équité. » 

Compte tenu de cette baisse, M. Macdonald se demande si les cotisations au RPC devraient être plus élevées pour les employés du secteur privé, puisque c’est lui qui abandonne les régimes de retraite pour ses travailleurs. De cette façon, leur RPC comblerait une partie des lacunes des régimes de retraite du secteur privé. 

« L’une des pistes est de mettre sur pied un régime public substitut pour compenser les régimes du secteur privé », dit M. Macdonald. « Nous devrions aider les gens à obtenir une meilleure sécurité de retraite. » 

L’ancien premier ministre du Nouveau- Brunswick, Blaine Higgs, avait apporté des modifications aux régimes de retraite à prestations déterminées pour certains employés provinciaux, dont ceux qui étaient déjà à la retraite et touchaient des prestations de pension déterminées, en les convertissant en régimes à risques partagés. 

Lorsqu’on lui demande de réagir à ces modifications à la lumière des conclusions de l’étude, M. Macdonald répond qu’il pense « qu’il vaut la peine de faire ce genre d’analyse, pour bien comprendre l’origine des rendements, en particulier les gouvernements par rapport à leurs propres régimes. En partie, le rôle de cette [étude] vise à mieux informer les décideurs politiques qui pourraient estimer que les cotisations versées pour leurs propres travailleurs sont exclusivement une dépense qu’ils ne récupéreront jamais, ce qui est absolument faux. Il s’agit d’un excellent rendement, dans la mesure où ils obtiennent 40 % d’une somme beaucoup plus imposante, en fin de compte. » 

Si les gouvernements décident de changer leurs régimes, ils se privent de ces recettes fiscales lorsque les pensions entrent en vigueur, et ils encourent aussi des coûts plus élevés pour la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti », fait valoir M. Macdonald. 

« Vous pouvez économiser de l’argent à court terme en coupant la sécurité de la retraite pour les travailleurs, mais vous perdez le revenu à long terme que vous auriez gagné de ces sources si elles étaient restées en place », conclut M. Macdonald.

 

Cet article a été publié dans le numéro du printemps 2025 de notre magazine interne, Sage. Maintenant que vous êtes ici, pourquoi ne pas télécharger le numéro complet et jeter un coup d’œil à nos anciens numéros aussi?