Les aînés ne constituent pas seulement un nombre croissant; ils sont en train de devenir une force politique extrêmement influente.
Cet article a été initialement publié le 23 décembre 2024 en anglais, par le quotidien Ottawa Citizen (en anglais).
L’année 2025 sera cruciale pour les aînés.
Tout comme bien d’autres pays, le Canada est à la croisée des chemins par rapport au vieillissement de sa population. Les défis sont notables, mais les possibilités le sont aussi. Il ne s’agit pas d’un simple enjeu politique de plus. Il s’agit d’une transformation qui va remodeler nos priorités en tant que ville et pays dans son ensemble.
Les chiffres sont révélateurs. À Ottawa seulement, les résidents de 65 ans et plus représentaient près de 17 % de la population de la ville lors du dernier recensement. Selon les données les plus récentes de Statistique Canada, il y a 7,8 millions de personnes âgées à l’échelle nationale. Ce nombre devrait atteindre 11 millions (lien en anglais) au cours des 20 prochaines années.
Les aînés ne font pas qu’augmenter en nombre; ils deviennent une force politique extrêmement influente, comme ils viennent de le prouver à Ottawa lorsque le conseil municipal a tenté d’augmenter considérablement les tarifs d’autobus pour cette population et a été forcé de battre en retraite. Les questions qui leur importent le plus sont celles que nous devrions tous prendre au sérieux.
Pourquoi? Eh bien, tout d’abord, parce qu’ils votent. Alors que le taux de participation des électeurs est en baisse dans de nombreuses démocraties, les aînés canadiens se présentent le jour du scrutin, par principe. Dans le groupe des personnes âgées de 65 à 74 ans, le taux de participation a constamment été d’environ 80 % lors des deux dernières élections générales. Ce niveau d’engagement signifie que les aînés ne se contentent pas de participer — ils animent la conversation et orientent la politique.
Cet automne, nous avons constaté comment cette influence passe à l’action. Prenons la récente proposition du gouvernement d’envoyer des chèques de 250 $ aux travailleurs canadiens. Ce qui a commencé comme étant une simple mesure économique est rapidement devenue une conversation plus générale sur l’équité, en particulier pour les personnes à revenu fixe, à savoir un grand nombre des Canadiens qui ont le plus besoin de soutien financier pendant une crise du coût de la vie. La réaction à la proposition a été si vive que le projet de loi a été mis en veilleuse, prouvant ainsi le pouvoir des groupes de défense des intérêts des aînés et de leurs alliés.
Passons maintenant au débat sur les pensions. Lorsque le Conseil du Trésor a transféré un surplus de 1,9 milliard de dollars de la Caisse de retraite de la fonction publique — un montant qui pourrait grimper à 9,3 milliards de dollars — dans les coffres fédéraux, les aînés ont réagi promptement. Rapide et virulente, leur opposition a montré à quel point ils peuvent être organisés et influents, en particulier lorsqu’il s’agit d’enjeux ayant une incidence sur leur sécurité financière.
Alors que nous évoluons dans cette donne changeante, un principe doit nous guider : « Rien ne se décide sur nous sans nous. » Les aînés doivent être au cœur de la prise de décision et de la recherche. Leur vécu offre des expériences qu’aucune étude ou statistique ne peut reproduire. Les politiques élaborées sans leur contribution risquent d’être décalées de la réalité, alors que celles orientées par leur voix peuvent entraîner à des changements réels et significatifs.
Il est également important de se rappeler que le vieillissement est une expérience partagée. Avec de la chance, nous deviendrons tous des aînés un jour, ou nous nous soucierons profondément d’une personne qui l’est. La création de collectivités-amies des personnes âgées, la garantie de pensions viables et le renforcement des systèmes de soins de santé sont bénéfiques pour toute la population, maintenant et pour les générations à venir.
Au-delà des politiques, ce changement démographique offre une occasion unique de réimaginer ce que signifie vieillir dans nos communautés. Le vieillissement n’est pas seulement un défi à relever, mais une étape de la vie qui peut être pleine de dynamisme, de contribution et d’innovation. Malheureusement, les Canadiens ne perçoivent pas tous le vieillissement de cette façon .
Un récent sondage (en anglais) mené par Ipsos pour la Coalition canadienne anti-âgisme révèle une lacune importante dans la compréhension des implications de l’âgisme : alors que 54 % des Canadiens connaissent bien le concept, 87 % n’en saisissent pas la prévalence généralisée. Ce manque de sensibilisation met en évidence un obstacle crucial pour ce qui est de favoriser une société qui considère le vieillissement comme une possibilité plutôt que comme une limitation. En reconnaissant la valeur des Canadiens âgés et en les incluant dans tous les aspects de notre dialogue national, nous pouvons bâtir une société qui respecte non seulement le vieillissement, mais qui le célèbre aussi.
Sur le plan politique, la leçon est claire : on ne peut ignorer les aînés et ce que vieillir signifie. Leur influence croissante signifie que leurs préoccupations seront au centre de la conversation nationale.
À l’approche de 2025, nous devons voir grand. Cela implique la création de politiques qui abordent les défis d’aujourd’hui, tout en nous préparant à une réussite à long terme. Il ne s’agit pas seulement des aînés. Il s’agit de bâtir un Canada qui fonctionne pour tous et toutes, maintenant et à l’avenir.
Anthony Pizzino est le directeur général (DG) de l’Association nationale des retraités fédéraux.